Méssage du Général AR Bruno DARY
Et, par Saint-Michel, vive les Paras !
Ce jeudi 29 septembre 2022, dans de nombreuses familles comme dans beaucoup de bureaux,
chacun veillera à souhaiter une joyeuse fête aux personnes qui s’appellent Michel – ou Michèle – car
le calendrier officiel précise que c’est le jour de la Saint-Michel. Et « que l’on croit au Ciel, ou que l’on
n’y croit pas », il ne viendrait à personne l’idée de modifier ce calendrier, car cette fête, que d’aucuns
peuvent appeler une coutume laïque, une habitude amicale ou une tradition religieuse, appartient au
patrimoine culturel français et ne dérange vraiment personne !
Pourtant, alors que la Saint-Michel sera fêtée tranquillement un peu partout en France, une statue
représentant l’archange Saint-Michel suscite une polémique aux Sables d’Olonne : une large partie
de la population, qui soutient le maire, souhaite son maintien ; et un petit groupe de personnes de
l’association des libres penseurs, au nom d’une conception étroite de la laïcité, demande à ce qu’elle
soit tout simplement retirée ! Faisons confiance à la justice de notre pays, qui juge « au nom du
peuple français » ; en effet, le maire a organisé une votation locale, qui a très largement plébicité le
maintien de cette statue dans son quartier éponyme, et, en l’occurrence, le peuple de France est
d’abord ceux qui sont concernés, à savoir la population de la ville !
Mais il est quand même surprenant qu’une simple statue dans une ville qui n’est pas une préfecture,
suscite une telle polémique ! A la limite entre la Bretagne et la Normandie, le Mont Saint-Michel
domine toute la baie, et reste visité par plusieurs centaines de milliers de personnes chaque année,
sans que personne ne remette en question son nom ou la statue qui trône à son sommet ! A Paris, au
cœur du 5° arrondissement, une fontaine porte le même nom et on ne compte pas les étudiants ou
les touristes qui sont heureux de se faire photographier devant ! Pas très loin des Sables d’Olonne,
une petite ville du bord de mer s’appelle Saint-Michel-Chef-Chef, sans que sa population n’en soit
offusquée ! Et enfin, dans les armées, Saint-Michel sera aussi fêté dans les formations parachutistes,
puisque depuis leur création, voici quelque 75 ans, Saint-Michel, image dans la Bible de l’intervention
venue du ciel, a été choisi comme « patron des paras » ! Il s’agit d’un moment de réjouissance
important, qui participe largement à l’esprit des parachutistes, sans que personne n’y trouve à
redire, bien au contraire !
A cet égard, dans la période agitée que nous vivons, les armées doivent pouvoir servir d’exemple –
comme d’ailleurs dans d’autres domaines – car de nombreux saints sont régulièrement honorés et
de telles polémiques ne voient pas le jour, car nos forces vivent une « laïcité apaisée ».
Au sein des armées, en effet, une distinction s’est faite naturellement entre le « culturel » et le
« cultuel ». Le domaine culturel est très large et ne couvre pas simplement l’histoire militaire et les
traditions ; comme dans le pays, il intègre des notions aussi fondamentales et concrètes, que le
respect de la personne, la manière de vivre, l’exemplarité du comportement individuel, la priorité
donnée à la mission, le goût du travail bien fait ; il comprend aussi des domaines plus militaires,
comme la disponibilité, la fraternité d’armes et la maitrise de la force. En un mot, tout ce qui peut
permettre de créer une vraie communauté, où chacun se sent bien et où il fait bon vivre. Le domaine
cultuel est bien plus personnel et relève de la vie privée, voire de l’intimité de chacun ; dans ses
implications pratiques et quotidiennes, il ne peut empiéter sur le domaine culturel, la vie de la
formation ou simplement le service quotidien ! Mais il mérite aussi toute sa dimension et tout son
respect, en raison de la spécificité militaire, car lorsque l’on est amené à conduire des soldats à
risquer leur vie en opérations, on ne peut leur refuser de croire qu’il existe un autre monde après la
mort….. et la dimension religieuse trouve une dimension particulière !
Il est vrai que nous vivons dans un pays de tradition et de culture judéo-chrétienne, ce qui facilite la
complémentarité de ces deux dimensions : on retrouve, par exemple, cette complémentarité dans le
calendrier, puisque les fêtes sont respectées, et de façon différentes : les journées nationales,
comme le 8 mai, le 14 juillet ou le 11 novembre ; les fêtes fixées par le calendrier, comme Noël, le
jour de l’An, Pâques, ou la Pentecôte ; puis les anniversaires plus particuliers, comme des batailles
restées célèbres dans l’histoire de la formation, Camerone pour la Légion ou Bazeilles pour les
Troupes de Marine ; et enfin, la fête de son saint patron, en l’occurrence la Saint Michel pour les
paras. Si le programme de l’unité ou les contraintes opérationnelles le permettent, la Saint-Michel
est fêtée le 29 septembre, sinon, elle le sera de façon décalée, ce qui ne pose pas de problème. Et
elle se traduit de façon différente au sein de chaque formation : challenge sportif ; cérémonie
militaire ; repas pris en commun ; accueil des anciens ; office religieux …. Le but de ces activités est
bien de favoriser ou de renforcer l’esprit de corps du régiment ou de la formation, qui veille chaque
année à honorer son saint patron ! La Saint-Michel est ainsi une opportunité de rappeler la fierté de
ses membres d’appartenir à une telle communauté. Et de même que la France peut être fière de ses
armées, elle peut aussi s’enorgueillir que les armées de la République fêtent leur saint patron, dans
un esprit laïc simple et apaisé !
Gageons qu’en cette journée, ils seront nombreux une fois encore, à s’écrier avec force :
« Et, par Saint-Michel, vive les paras ! »